S’il y a un concept freudien qui suscite le plus de controverse chez les spécialistes, c’est la  notion de  représentant-représentation. En effet, la traduction du terme allemand « Vorstellungsrepräsentanz » suscite des problèmes de terminologie et d’interprétation sémantique dans sa version française. Ce sont donc un terme et un concept qui nécessitent une plus ample explication. C’est ce que nous allons essayer de développer dans le présent article.

La notion de représentant-représentation 

Pour présenter les notions de représentant et de représentation, Freud utilise le terme de Vorstellung et de Repräsentanz. Sur le plan sémantique, les traducteurs s’accordent. Néanmoins, le problème réside dans le choix terminologique pour désigner clairement la notion. Ainsi pour pouvoir l’aborder sans risque, il vaut mieux clairement expliquer le concept.

Le terme allemand Vorstellung désigne la représentation, ou conception mentale d’une chose. En d’autres termes, il désigne la manière dont on se figure quelque chose. Il s’agit donc de l’image (mentale) qui vient (à l’esprit) à propos d’une chose ou encore de la façon dont on conçoit les choses de manière consciente. On peut dire alors que c’est la conscience d’un être ou d’une chose.

Cependant, dans la conception psychanalytique de Freud, ce terme a un sens plus spécifique, une acception plus étroite. Ceci relève de la pulsion. Pour lui, ce vocable désigne la chose par laquelle se manifeste la pulsion dont elle est, en quelque sorte, la sublimation.

Certains phénomènes psychiques ne peuvent remonter jusqu’à la conscience que sous l’effet d’une quelconque censure. Ainsi, ils seront refoulés, mais cherchent quand même à se frayer un chemin pour resurgir, sous la pression de la pulsion, et à refaire surface de manière détournée. Cela peut être une forme picturale, sonore ou olfactive. Ils peuvent également prendre l’aspect du désir : le désir œdipien est un Vorstellung. Ces phénomènes peuvent se présenter sous la forme d’un scénario tel que l’on peut voir dans les rêves.

Une remontée inconsciente de phénomène psychique refoulé

Jusqu’à présent, la façon de traduire ce terme freudien est encore sujette à controverse. Bon nombre de traducteurs ont validé le terme de représentation. Ils l’ont, sans doute, fait par pur conformisme, en suivant la terminologie choisie par les dictionnaires.

Le terme utilisé par les dictionnaires représente un phénomène conscient. Pourtant, celui de Freud désigne une activité psychique inconsciente. En effet, une fois le phénomène psychique original refoulé, elle produit par substitution, de façon détournée, une image ou un scénario. Elle le fait, en quelque sorte, à l’insu de la conscience, donc de façon inconsciente. 

La représentation est également susceptible de se charger émotionnellement. Cet affect se manifeste généralement sous forme d’angoisse. Il peut également surgir sans substitut, même s’il est le fruit de la pulsion. Comment désigner ce dernier phénomène ? Quel terme conviendrait le mieux pour désigner une manifestation indépendante de l’image (la forme extérieure qu’elle prend) ?

Pour pallier ce problème, Freud a choisi le terme de Repräsentanz. Ce terme est ainsi choisi, car il n’appartient pas au lexique courant. Le choix de ce substantif réside dans le fait que ce mot peut désigner une chose ou un être humain.

La Repräsentanz, cette sublimation de la pulsion, peut surgir seule, mais elle peut également avoir un contenu : la représentation. Dans ce cas, elle est appelée Vorstellungsrepräsentanz ou représentant-représentation.