Psychose « froide » et « psychose blanche » ou psychoses dites non psychotiques sont des concepts psychanalytiques qui firent référence au défi lancé à la clinique par André Green, Jean-Luc Donnet, Evelyne Kestemberg dans les années 70. Par le passé. Ils soulevèrent quelques polémiques, ils s’inscrivent aujourd’hui entre deux consensus : état limite et psychose /clinique et psychanalyse moderne. La psychanalyse révéla certaines particularités de ces états qualifiés de « non-délirants ».
Sans être notables, ces observations spécifiques offrent cependant un examen nuancé de la psyché du sujet en proie à une pulsion chaotique, dans sa relation à l’objet. Il n’use pas nécessairement d’élaborations délirantes ou hallucinatoires, telles que définies par les outils nosographiques. L’épiphénomène que devient la « plaie narcissique sociétale » vient soutenir ces deux concepts.
E. Kestemberg, lors de ces travaux sur l’anorexie, mit en évidence les points de vue distinctifs de la psychose froide. Cette pathologie produit des délires reconnus dans la problématique psychotique. Il y a négociation avec l’objet dans une fantasmagorie consciente. Cependant, dans la psychose froide non délirante, le besoin et l’objet disparaissent. Demeure alors, seule, la relation non libidinale, non fantasmatique et paradoxalement autoérotique avec l’objet fétiche. Elle qualifia cette objection relationnelle à l’objet, d’« homosexualité primaire », mettant en scène l’objet primaire.
La psychose froide marque cette ambivalence relationnelle à l’objet, non résolue et actionnant l’élaboration de la structure psychique perverse. Cette digression consciente tient donc lieu de protection, visant à refouler tout conflit laissant cet objet indistinct, ouvrant les portes d’un délire non réalisable. Notons que cet objet « froid », qualifié d’autoérotique, clivé, et inchangeable se présente dans les « délires du corps » chez les anorexiques. On pourrait supposer que la prédisposition d’auto érotisation de cet objet vif et confus maintient l’univers clos de la psychose froide.
La notion de psychose blanche, relatée par J. Donnet et A. Green, revisite l’origine du conflit structural de la psychose, à savoir que les attaques pesantes de la pensée tiendraient plus des causes que des conséquences, à destination du CA.
W. BION, l’évoquait déjà, la psychose serait une pathologie inverse à la névrose, car elle modifierait la réflexivité qu’autorise « l’appareil à penser les pensées » ; c’est-à-dire que ce serait la pensée qui défierait la pulsion. Ainsi la pensée obsédée par le mauvais objet vide le contenu de ses pensées. Cette vacance est différente du vide lié à la perte de l’objet, la blessure narcissique rencontrée dans la névrose.
Elle se traduit par une dévalorisation éprouvée par le sujet. La « tri-bi-angulation » détermine la psychose blanche. Elle rejoint les concepts œdipiens où le sujet fuira le mauvais objet, ou s’ajustera au bon réfléchissant le mauvais. L’ambivalence est irréalisable. Symboles et pensées évoluent ensemble avec les représentations. Il en résulte un « blanc », lié à une carence d’image identificatoire positive, que A. Green déclina sous deux images hallucinatoires : 1- négative maternelle, 2- destructrice négative du sujet pour lui-même.
La pensée constitue le sujet, submerger négativement son appareil à penser, brise son identité. Ceci peut sembler abscons, selon que l’on y perçoive soit un enrichissement, soit une complexité dans la compréhension des états psychotiques. La psychose bascule d’un conflit représentatif insupportable rejeté, vers une conscientisation illustrant la limite d’élaboration de schémas représentatifs. Il y a un déficit organisationnel. Symboliser un objet absent, le figurer est un nouvel enjeu dans la compréhension de la psychose et de la vie psychique contemporaine.
0 commentaires